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Données médicales. Une mine d'or convoitée

Prescriptions, efficacité des médicaments, causes de décès, honoraires ou remboursements : la France dispose d'une des plus grandes, « voire de la plus grande base médico-administrative du monde », selon un rapport de 2013. Le gouvernement promet de davantage partager ces données : une manne précieuse pour les industriels. 

 

1. Un enjeu de taille. 


Près d'1,2 milliard de feuilles de soins par an, 500 millions d'actes médicaux et 11 millions d'hospitalisations sont recensés par le système national d'information interrégime de l'Assurance-maladie (Sniiram) et le Programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI) des hôpitaux. Des données sensibles, rendues anonymes, auxquelles, pour l'heure, n'a accès qu'un cercle restreint - chercheurs du public en tête -, alors qu'elles peuvent intéresser bien d'autres secteurs comme les start-up de l'e-santé ou les patients eux-mêmes. 

 

2. Un trésor inexploré. 


L'entreprise morbihannaise Celtipharm a été la première à solliciter l'accès à cette mine d'or. Spécialiste français du traitement des données de santé, la bretonne (12 millions d'euros de chiffre d'affaires) ambitionne en effet, grâce à son savoir-faire en statistiques, d'explorer les feuilles de soins électroniques pour réaliser des études épidémiologiques sur la consommation médicamenteuse ou la prévention des situations à risques. D'autres sociétés, comme Withings, misent elles aussi sur le coffre-fort des données publiques pour développer la vente d'objets connectés. 

3. Éviter des scandales sanitaires. 


À l'heure du tout numérique, l'ouverture des données de santé offrent bien d'autres perspectives. « Nous voulons étudier les restes à charge, les dérives de prescriptions », explique Christian Saout, secrétaire général délégué du Collectif interassociatif sur la santé (Ciss), qui représente les patients. Et pour qui le scandale du Mediator, souvent utilisé comme coupe-faim, aurait pu être « identifié plus tôt » en repérant les prescriptions inadéquates à des patients non diabétiques. Développer l'« open data » permettrait aussi aux complémentaires santé, qui déplorent souvent leur rôle de « payeurs aveugles », de comparer la pertinence de l'offre de soins à l'aune des remboursements qu'elles versent. 

 

4. Accès aux données : quels garde-fous ? 


Ces arguments semblent avoir été entendus par la ministre de la Santé, Marisol Touraine, qui envisage, dans son projet de loi de santé, une ouverture, timide, mais inédite, des données de la Cnamts (assurance-maladie des travailleurs salariés) aux sociétés à but lucratif. Avec quel accès aux données ? Quels garde-fous ? C'est toute la question. Pas de problème pour les données ne présentant aucun risque d'identification des patients ou des professionnels : elles seront mises en ligne gratuitement et ouvertes à tous. « Ce qui pose problème, c'est l'accès régulé aux données potentiellement réidentifiantes », expose ainsi Christian Saout. 

 

5. Les patients dénoncent un risque de piratage. 


Pour le Ciss, le mécanisme prévu s'apparente à une usine à gaz. En cause : la création d'un gigantesque « système national des données de santé » regroupant le Sniiram, le PMSI, des données sur les causes de décès des collectivités territoriales ou encore des données de remboursement personnelles transmises par les complémentaires santé. Une « base énorme (qui) justifie des protections énormes », dixit Christian Saout. Des autorisations délivrées par la commission nationale informatique et libertés (Cnil), en fonction de critères arrêtés par le ministère, comme l'intérêt général du sujet de recherche présenté. Et un accès payant à ces données. 

 

Bilan : des données difficilement accessibles mais aussi plus sensibles au piratage, selon le Ciss, la Mutualité française et l'Ordre des médecins, qui préféreraient créer des liens entre les différentes bases existantes pour croiser les données en fonction des sujets de recherche.

 

 

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